Un travail de longue haleine
 
 
A Escles, réunion de l'association des maires des Vosges
Organiser une solidarité efficace entre les communes
Devant le détresse qui frappe depuis quelques jours les communes sinistrées, l'association des maires des Vosges a décidé de se concerter pour établir une solidarité efficace entre les communes. Le bureau de l'association s'est donc réuni hier à 17 h, à la salle des fêtes du Void-d'Escles. sous la présidence de M. Braun, maire de Cornimont.
 
On notait la présence de MM. Beltrame, député, Bidaud, Jeanroy, Hubert Voil-quin, Rolland Marchai, Paul Didier, vice-présidents du conseil général, Didjerjean, conseiller général et quelques maires des communes sinistrées.

Une intervention exceptionnelle des communes non sinistrées

Deux grands axes ont été d'abord déterminés: il s'agit de prévoir une action des communes sous forme de subvention exceptionnelle, et une action de solidarité des particuliers sous forme d'urnes déposées dans les lieux publics. Les communes se chargeront ensuite de rassembler ces fonds. Elles devront les adresser à l'association des maires, 6, rue de la Préfecture. Mais attention, il ne s'agit pas de mélanger les deux aspects.
En effet, la subvention communale sera versée aux communes alors que l'argent des administrés sera donné en aide à des particuliers qui en auront le plus besoin, qui seront les moins indemnisés. Ces actions doivent être menées rapidement et tous les maires recevront des circulaires à cet effet. Les conseillers généraux des cantons seront chargés de coordonner et d'harmoniser ces initiatives.
Alors qu'on apprenait hier soir la décision d'arrêt du plan ORSEC, l'association des maires s'est prononcée avec vigueur pour que ce plan soit prolongé et va intervenir dans ce sens. « On ne peut envisager que l'armée se retire actuellement », a ajouté M. Braun. « L'action à mener n'est pas uniquement immédiate, a-t-il ajouté. C'est un travail de longue haleine ». Aussi a-t-on envisagé en commun l'après-plan ORSEC. Chaque commune non sinistrée pourrait, dans la mesure de ses moyens, mettre à la disposition des communes en difficulté, par exemple un camion et quatre hommes pendant quelques jours.
 
L'association des maires s'est prononcée en faveur du maintien du plan ORSEC
Ainsi, avec un bon relais, ces communes pourraient avoir en permanence une main-d'œuvre qualifiée le temps qu'il faudra. Car, les maires présents l'ont bien souligné, « Il nous faut des gens compétents ». D'autres idées ont été soulevées, notamment l'emploi des bénévoles : les étudiants pendant les vacances ou les chômeurs. Ce point est épineux, en raison du problème d'assurance. En ce qui concerne les chômeurs, des contacts vont être pris avec les A.S.S.E.D.I.C. pour envisager l'éventualité de maintenir une assurance à ces travailleurs bénévoles.
 
Plus d'un siècle pour reconstituer la forêt
 
Comme le rappelait M. Voilquin, la destruction de la forêt est l'aspect le plus dramatique de cette catastrophe ; en effet, il faudra plus d'un siècle pour la reconstituer et c'est une tragédie pour certaines communes qui en tirent la plupart de leurs subsides : Bocquegney, par exemple. Aussi souhaite-t-on agir auprès du ministre des Finances afin que l'impôt de ces communes soit exceptionnellement minoré.
L'association des maires entend appuyer le préfet afin que les Vosges soient déclarées zone de catastrophe naturelle et va inviter le conseil régional à venir constater sur place le sinistre.
Bref, de nombreuses idées ont fusé et l'on a senti au cours de cette réunion une véritable solidarité au niveau des élus, qu'ils soient maires ou conseillers généraux.

Au P.C. d Escles, les vêtements ont été entreposés avant distribution.
Pour les maires du canton de Châtel
 
La forêt : un souci majeur
 
EPINAL. - Réunion hier soir des maires du canton de Châtel, à la mairie de Chave-lot, sous la présidence du conseiller général, Robert Bresson. A ses côtés, le président Poncelet, le secrétaire général, M. Balon, Gérard Braun, des représentants -de la D.D.A. et de l'O.N.F...
De quoi animer un débat qui a bien sûr abordé toutes les questions que se posent élus et populations des communes sinistrées :  sur l'efficacité des contrats d'assurance, la nécessité des expertises, les aides financières de l'Etat, l'utile dégagement des rivières, l'exigence du maintien du plan ORSEC, la résiliation des baux de criasse, la mise en œuvre de la procédure des calamités agricoles.
Bref, tout ce qui constitue le prochain quotidien communal. Un moyen pour le président Poncelet de repréciser la  responsabilité et...
l'aide du conseil général, pour Gérard Braun d'évoquer les volontés de ses adhérents et pour chacun des maires présents de faire le bilan des dégâts enregistrés dans la commune.
Un tour de table qui en dit long sur l'œuvre de reconstruction à entreprendre, et ce dans un canton qui a relativement moins souffert que • celui de Dompaire, par exemple. Sur le plan des constructions, en tout cas, car la majorité des forêts et des vergers y sont très atteints.
De nombreuses communes se voient ainsi privées de l'une de leurs ressources essentielles. Ce n'est pas le moindre des soucis d'élus qui poursuivent dès aujourd'hui leur délicate mission de coordonnateur.
Un rôle et une bonne volonté qui jamais n'auront été aussi utiles qu'aujourd'hui
 
Le long silence de l'Etat ...et le faux bond de René Souchon
 
Le 17 juillet au soir - six jours après la catastrophe, et le long week-end du 14 juillet enfin digéré - le gouvernement donne signe de vie. Enfin.
Le préfet Bouhin peut faire état de la répartition dans la journée, de 300 000 F aux familles.les plus démunies d'Escles, Harol, Hennecourt. Gaston Defferre et Pierre Mauroy, qui ne sera plus Premier ministre quelques heures plus tard,  télégraphient :
« L'Etat débloque 600 000 F à titre de secours de première urgence ».
Ce geste, au demeurant modeste, met fin « au long silence du gouvernement », condamné le jour même par le bureau du conseil général réuni à Travexin.
Rappelant qu'il avait dès le 13  juillet  créé  un  fonds  de
solidarité doté de 5 millions de francs, attribué des secours d'urgence aux sinistrés, le conseil général rappelait avec force que le plan ORSEC est de la seule responsabilité de l'Etat.
Ceci pour mettre fin à l'ambiguïté, née des déclarations du député de la Plaine, Serge Bel-trame, tendant à faire endosser au département et au conseil général la responsabilité de certains contretemps.
Conséquence de la démission du gouvernement Mauroy : René Souchon, secrétaire d'Etat à la Forêt, était contraint le 17 juillet au soir d'annuler sa visite dans les Vosges.
Un faux bond dont le maire d'Aurillac n'est pas responsable, mais qui allonge encore « le long silence de l'Etat ».
 
 
M. Souchon a failli... venir
12 000 ha de forêts atteints

Un dossier qui pèsera lourd

EPINAL. - Pour plusieurs décennies, voire plus d'un siècle, le dossier concernant les dégâts forestiers de la tempête de mercredi soir fera sans aucun doute date dans les Vosges. Pour le premier secteur économique touché, l'ampleur du désastre est effrayante.
Pour .l'instant, les services des Eaux et Forêts ont établi un bilan catastrophique. Qu'on en juge : sur les 12 000 hectares atteints, près de 6 000 sont à raser et à replanter. Ce qui nécessitera un budget pour l'exploitation et la reconstitution de près de 600 millions de francs, lourds bien entendu (350 M.F. d'exploitation et 234 de reconstitution).
Malheureusement, le bois coupé, à grand prix, ne sera que de qualité très médiocre et sera essentiellement destiné aux industries de trituration ou vendu simplement au quart ou au tiers de sa valeur marchande avant tempête. La réalisation commerciale ne pourra atteindre au maximum que la moitié des frais de débardage et de repeuplement, soit 300 M.F. maximum.
« Rien que pour les propriétés forestières du département, les dégâts enregistrés représentent l'équivalent du budget d'une année du conseil général », devait préciser M. Poncelet, le président de l'assemblée vosgienne, après avoir écouté, hier soir, les chiffres donnés par un représentant de l'O.N.F.
Par ailleurs, la direction des services économiques et financiers a d'ores et déjà décidé de bloquer les coupes domaniales (feuilius et conifères) dans le département des Vosges et d'opérer une rétention quant aux coupes communales.
Dans les trois autres départements lorrains, une limitation des coupes est également prévue. Le problème reste entier quant à la destination de ces grumes ou « restes » de grumes. Déjà, le même service d'Etat a rencontré les responsables d'établissements de transformation et de trituration pour tenter d'obtenir un « prix de campagne », le reste devant être exploité en régie ou vendu par adjudication en bloc, avec bien sûr accord des propriétaires et des maires.
 

François Guillaume intervient auprès de Pierre Mauroy


NANCY. - De son côté, M. François Guillaume, président de te F.N.S.E.A., vient d'envoyer un courrier au Premier ministre M. Pierre Mauroy afin que certaines mesures d'urgence soient prises en faveur des agriculteurs dont les exploitations ont été sinistrées.,
M. Guillaume demande ainsi le versement immédiat d'une « aide d'attente » d'environ 600 F par bovin pour les exploitants agricoles touchés par les sinistres. M. Guillaume demande également le paiement « dans les plus brefs délais » des indemnités de calamité 1983 qui n'ont toujours pas été versées à ce jour. De même le leader de la F.N.S.E.A. demande au Premier ministre que l'armée intervienne afin d'aider au dégagement des voies d'accès des exploitations agricoles touchées, de même que la réparation des clôtures et au dégagement des chablis.
Le concours de l'armée est également demandé pour le transport des matériaux de première urgence destinés aux réparations importantes, de même que pour le transport du fourrage collecté dans les départements voisins par les F.D.S.E.A. pour les agriculteurs vosgiens sinistrés. Enfin, M. Guillaume demande à Pierre Mauroy la libération anticipée des jeunes agriculteurs concernés par le désastre de la semaine dernière et qui se trouvent actuellement sous les drapeaux.

 


Extraits L.E. du 17 JUILLET